Marc Romainville, professeur au département Education et Technologie de l'université de Namur (Belgique) est l'auteur d'un rapport sur l'évaluation des acquis des étudiants, commandé par le Haut Conseil de l'évaluation de l'école (Hcéé).

Marc Romainville, professeur au département Education et Technologie de l'université de Namur (Belgique) est l'auteur d'un rapport sur l'évaluation des acquis des étudiants, commandé par le Haut Conseil de l'évaluation de l'école (Hcéé).

Son analyse met le doigt sur des points perfectibles du système français. Le rapport stigmatise la lourdeur de l'organisation d'examens qui a « pour conséquence fâcheuse de reléguer au second plan les réflexions pédagogiques sur l'évaluation.»

Egalement dénoncé le flou qui entoure la sanction des connaissances à l'université et «la grande hétérogénéité des pratiques» en la matière. Une absence de standardisation que Marc Romainville explique en partie par «une longue tradition de « liberté académique»».

«L'évaluation par la restitution» inspire des doutes au chercheur. Ce système produirait des étudiants « à l'affût de ce qui leur sera demandé aux examens et (qui) ont tendance à y adapter leur manière d'étudier.»

Dans son huitième avis paru le 21 avril 2003, le Haut Conseil de l'évaluation de l'école estime «indispensable que soient rapidement envisagées des évaluations-bilans permettant d'apprécier et de comparer les progrès que les différentes filières de l'enseignement supérieur assurent à leurs étudiants.»


Comment avez-vous mené cette enquête ?

Initialement, je travaillais avec Yves Lichtenberger sur ce rapport. Mais, rapidement, il a été nommé président de l'université de Marne-La-Vallée. Me retrouvant seul, j'ai limité le nombre d'entretiens à une douzaine. J'ai rencontré des enseignants-chercheurs, mais aussi des présidents d'université, c'est-à-dire les gens qui se trouvent au cœur de la question.

J'ai également procédé à une étude de documents. J'avais, à ma disposition, des études du CNE, de l'AMUE, mais également les travaux de Marie Duru-Bellat à Dijon. Sur le sujet, j'ai également tiré profit de la littérature des pays du Nord (Angleterre, Belgique…) qui ont beaucoup travaillé sur ces questions, plus que les pays « latins ».

Enfin, je me suis livré à une étude de cas, ce qui est nouveau dans la méthodologie du Hcéé : je me suis rendu sur deux sites universitaires différents pour interroger les enseignants qui m'ont expliqué de A à Z leurs pratiques d'évaluation.

Quels problèmes rencontre le système d'évaluation des acquis « à la française » ?

On m'a reproché d'avoir été très critique à l'égard du système. Et il est vrai qu'une donnée importante ne ressort pas assez de mon travail : ce rapport a été possible. Une telle enquête ne l'aurait pas été il y a vingt ans. Cela prouve bien que le débat est ouvert et qu'un mouvement de réflexion sur les pratiques est engagé.

Maintenant, le problème majeur du système reste le manque d'explicitation des objectifs de formation. On se pose rarement la question « que voulons-nous que nos étudiants maîtrisent à la sortie de l'université ? » Sans cette définition, les évaluations sont difficiles à mener. Ceux qui pâtissent le plus de cette opacité sont les élèves défavorisés, qui ont du mal à décoder les objectifs implicites.

Que préconisez-vous pour améliorer l'évaluation des acquis des étudiants ?

Il faut d'abord souligner certains signes encourageants. Pour les licences professionnelles, par exemple, j'ai noté que ce travail d'explicitation des objectifs se faisait progressivement. De même, la mobilité étudiante en Europe et le LMD vont certainement favoriser une meilleure explicitation des acquis.

Mais on pourrait également, à l'échelle nationale, mettre en place des opérations standardisées de bilan. Par exemple : « que savent les étudiants en histoire à la sortie de la licence ? » Il s'agirait de faire réfléchir l'équipe pédagogique et ainsi, mettre en lumière les forces et les faiblesses d'une formation.

A l'échelle locale, il conviendrait de professionnaliser les pratiques d'évaluation. Cela signifie clarifier le contrat pédagogique, mettre en place une formation ou un accompagnement pédagogique des enseignants du supérieur, sortir un guide de l'étudiant dans lequel les critères d'évaluation soient clairement édictés…

Y a-t-il des pratiques intéressantes dans d'autres pays et dont la France pourrait s'inspirer ?

Il existe, notamment en Belgique, des services universitaires de pédagogie. Ils assurent une formation initiale minimal puis un suivi individualisé à la demande de l'enseignant.

En Grande-Bretagne a été mis en place le système des examinateurs externes : des professeurs venus d'autres établissements émettent des avis sur les critères d'évaluation de l'université dans laquelle ils ont été « invités ». Ces initiatives sont autant d'occasions d'établir un dialogue et d'instaurer un débat sur les pratiques.

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