A l'occasion de la publication du rapport "Les étudiants étrangers en France" par la Direction de l'évaluation et de la prospective Actu s'est rendu au commissariat général du plan pour s'entretenir avec Mohamed Harfi, responsable du groupe de projet Saraswati.

A l'occasion de la publication du rapport "Les étudiants étrangers en France" par la Direction de l'évaluation et de la prospective Actu s'est rendu au commissariat général du plan pour s'entretenir avec Mohamed Harfi, responsable du groupe de projet Saraswati.

Ce groupe, qui porte le nom de la déesse Hindoue de la connaissance, de la science et de l'art, travaille plus particulièrement sur les questions de l' attractivité de la France pour les activités de recherche-développement. Il publiait récemment un "4 pages" sur "l'attractivité pour les étudiants étrangers et potentiel de la recherche en France".

La mobilité internationale étudiante est donc une composante essentielle des réflexions de l'équipe de M Harfi.


Pouvez-vous nous expliquer quel est la mission du groupe Saraswati?

Nous sommes en présence d'un phénomène de mobilité internationale qui concerne les activités de production mais aussi de recherche. Par rapport à ce phénomène de mobilité le groupe de projet Saraswati, dans une démarche prospective, s'intéresse à la question de "l'attractivité" de la France au niveau mondial.

Nous avons retenu trois axes d'étude. Les deux premiers concernent les ressources humaines en sciences et technologie, à savoir, dans un premier temps, la mobilité internationale des étudiants, et, dans un deuxième, celle des chercheurs et ingénieurs. Pour finir, le troisième axe portera sur l'internationalisation de la recherche industrielle.

Nous sommes actuellement sur le premier volet. Cette première analyse est proche de son terme et nous entamerons, dans trois semaines, les travaux concernant les deux autres axes. L'objet du groupe de projet est d'analyser la mobilité internationale des étudiants, des chercheurs et des ingénieurs et de construire des scénarii d'évolution possibles afin d'éclairer les décisions publiques. Notre travail porte sur les flux entrants mais aussi sur les flux sortants d'étudiants,de chercheurs et d'ingénieurs français vers l'étranger.

Les travaux concernant la mobilité internationale étudiante, ont débuté depuis 10 mois. Nous allons publier les résultats vers la fin du premier semestre 2005. Deux "4 pages" sont déjà disponibles sur notre site, ils offrent une présentation intermédiaire des travaux [cf lien ci-dessous]

La mobilité internationale des étudiants, chercheurs et ingénieurs est quelque chose de positif. Au-delà de l'enrichissement personnel, c'est un moyen pour les établissements d'enseignement supérieur et les laboratoires de recherche d'être compétitif et de développer la coopération scientifique internationale.

A 80% les pays de l'OCDE accueillent ces étudiants en mobilité internationale. Par exemple pour 2000-2001 nous pouvons estimer à 60 000 le nombre d'étudiants français qui poursuivent leurs études dans les pays de l'OCDE.

Sur les cinq dernières années la DEP note dans son rapport une augmentation des effectifs d'étudiants étrangers, à quoi cela est-il dû à votre avis?

Il faut distinguer deux types de facteurs, quantitatifs et qualitatifs.

Pour l'aspect quantitatif, il faut savoir que le nombre d'étudiants accédant aux études supérieures dans le monde a fortement augmenté.

En outre certains pays, comme la Chine, par exemple, n'ont pas la capacité d'accueil suffisante pour former l'ensemble de ses étudiants. On constate ainsi une forte augmentation des étudiants chinois en mobilité internationale. Leur nombre a été multiplié par huit en France sur les cinq dernières années.

Notons par ailleurs une forte demande globale de mobilité internationale. Le nombre d'étudiants en mobilité internationale a augmenté pour atteindre, au niveau mondial, 1,7 millions de personnes en 2001. Ces facteurs peuvent donc expliquer, en partie, l'augmentation des étudiants étrangers inscrits dans l'enseignement supérieur français.

Ajoutons à l'ensemble de ces données une politique volontariste de l'Etat visant à attirer les étudiants étrangers vers le système d'éducation français. Je pense notamment aux politiques de MM Alègre et Védrine et la création d'Edufrance et du Conseil de la mobilité internationale. Cette politique a été poursuivie et renforcée par tous les gouvernements qui ont suivi. Des mesures récentes ont été annoncées à la Baule par le Premier Ministre, Jean-Pierre Raffarin.

Suite à ces facteurs quantitatifs il faut aussi aborder l'aspect qualitatif. C'est à dire qu'il faut s'interroger sur la motivation de ces étudiants. Malheureusement nous ne disposons pas d'études suffisamment fines et on ne sait pas toujours pourquoi ces étudiants ont choisi la France plutôt que l'Allemagne ou l'Europe plutôt que les Etats-Unis.

Concernant les Etats-Unis, il faut savoir que c'est le seul pays à ne pas connaître d'augmentation de ses flux entrants d'étudiants et même de constater une baisse depuis 2001. Il faut noter cependant que ce pays accueille déjà le tiers des étudiants en mobilité internationale.

Pour revenir sur cet aspect "qualitatif" que savons nous de ces "étudiants étrangers" en formation dans l'enseignement supérieur?

Tout d'abord, il faut souligner la qualité du travail statistique fourni par la DEP, qui donne des éléments d'information très utiles à nos analyses et éclaire les acteurs concernés. Ce travail expose l'évolution du nombre d'étudiants étrangers en France, notamment par pays/zones géographiques, par disciplines et par établissements.

Il existe cependant des problèmes méthodologiques, mais qui concernent l'ensemble des pays de l'OCDE. Par exemple, le problème de mesure statistique du nombre d'étudiants étrangers dans un pays.

Nous avons deux sous-groupes. Un premier constitué par les étudiants en mobilité internationale qui viennent spécifiquement en France pour suivre des études. Même si ils ont un niveau d'étude jugé au moins équivalent au bac français nous les nommons "non bacheliers", sous entendu "non bachelier du système français".

Un deuxième groupe est constitué par des étudiants qui vivent en France depuis plusieurs années mais qui sont de nationalité étrangère. Il ont suivi le cursus français classique et ont obtenu un baccalauréat français. Ils sont considérés comme étudiants étrangers et bacheliers, mais ne sont pas en réalité des étudiants en « mobilité internationale ».

Est ce que vous pensez que ce phénomène d'augmentation des inscriptions va s'amplifier?

L'idée est moins de s'intéresser au diagnostic actuel que d'identifier les tendances et les variables importantes pour l'avenir.

Parmi ces variables il y a celle du nombre d'étudiants en mobilité internationale qui va augmenter de façon importante. Leur nombre va sans doute doubler dans les dix ou quinze années à venir. La question est de savoir quelle devrait être la stratégie de la France face à ces évolutions.


Le groupe saraswati publiait en juin 2004 une note concernant l'attractivité pour les étudiants étrangers et le potentiel de la recherche en France. Vous abordez dans ce texte la question du remplacement et/ou du recrutement des personnels de recherche. L'évolution du nombre d'étudiants étrangers tel qu'il est constaté pourra t-il éviter une pénurie des personnels?


Nous avons engagé notre réflexion dans la cadre d'une problématique sur la recherche en France.

Selon nos travaux, le marché de l'emploi des personnels de la recherche risquerait de connaître une pénurie. Dans l'ensemble des mesures que nous proposons nous conseillons d'abord d'essayer d'améliorer le taux de réussite dans les premiers cycles, notamment des filières scientifiques. Dans un deuxième temps il est de notre avis d'avancer sur la question de l'attractivité de ces cursus, et sur celle de la culture scientifique et technique dans son ensemble. Pour finir nous pensons qu'il serait judicieux de donner une meilleure image aux carrières et métiers de la recherche dans les secteurs public et privé.

Ensuite, et seulement ensuite, il est possible d'envisager avoir recours à la mobilité internationale étudiante pour pallier à cette possible pénurie des personnels de recherche. Si cette option est envisagée, plusieurs questions se posent ? Accueillir plus ou moins d'étudiants? Disposerions-nous des capacités et de la qualité d'accueil nécessaires ? Devrait-on sélectionner selon les pays/zones géographiques, selon les disciplines et filières et selon les cycles de formation du supérieur ? Si le nombre d'étudiants en mobilité internationale augmente devrions-nous suivre cette augmentation dans les mêmes proportions, ou pas et donc maintenir ou pas la part mondiale de la France en termes d'accueil des étudiants étrangers ?

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