Suite à l'article à charge d'Elaine Sciolino paru dans le New York Times Act'U a souhaité recueillir les réactions de l'équipe dirigeante de l'université citée en exemple. Rencontre, à Paris X, avec Olivier Audéoud, président de l'université et Marc Petit, chef de cabinet.


Elaine Sciolino, journaliste au New York Times, n'est apparemment pas adepte de la demi-mesure. Son article (lire sur le site du Herald Tribune ) décrivant l'université de Nanterre, paru dans l'édition du célèbre quotidien le 12 mai dernier est sans appel. L'université de Paris X- Nanterre serait un vaste campus où rien ne vit : "[..] il n'y a pas de centre étudiant, pas de librairie, pas de journal étudiant, pas d'orientation pour les primo-entrants, pas de service de mise en relation avec le monde de l'entreprise".


Les nouvelles technologies semblent tout aussi absentes avec seulement "30 ordinateurs connectés à internet sur 100". Le problème de la capacité d'accueil des salles de travail est pointé du doigt puisque, "au moment des examens beaucoup d'étudiants doivent trouver de la place ailleurs".


Pour les dirigeants de Paris-X s'il ne fallait retenir qu'une approximation ce pourrait être celle-ci. "Pour les examens nous répartissons les places pour éviter les fraudes avec des espaces vides entre chaque étudiant. Ainsi les places sont attribuées à chaque étudiant en examen qui a, de fait, une place".


"Only 30 of the library's 100 computers have Internet access"(1)


"Quand on fait des micros-trottoirs on s'expose à ce genre d'approximation. Ne serait-ce qu'à la BU il y a plus de 100 postes connectés à Internet" remarque Marc Petit, "il est bien évident que les étudiants disposent d'un grand nombre d'ordinateurs entre la bibliothèque principale, les bibliothèques d'UFR et les ateliers d'informatique. De plus nous sommes en train de compléter l'installation d'un réseau WIFI sur l'ensemble du Campus grâce auquel les étudiants peuvent se connecter librement et partout à Internet"


Concernant la Bibliothèque Universitaire "c'est l'une des premières ou la première de France a avoir autant d'ouvrages en accès direct, plus de 80%" intervient Olivier Audéoud.


Selon Arnaud Lebret, technicien de maintenance informatique à la BU, les chiffres avancés par la journaliste du New York Times sont "approximatifs". "Il y a 120 ordinateurs à la BU. Tous sont connectés à Internet mais offrent des services différents. Certaines sont utilisées pour la recherche sur des catalogues locaux, d'autres à la recherche sur des bases de données et catalogues distants. 15 machines sont uniquement dédiées à la recherche documentaire sur Internet"


Cette organisation permet de répartir la charge des utilisateurs et leur assurer que des machines seront disponibles pour les recherches spécifiques.

Etre connecté à Internet ne signifie pas seulement faire des recherches sur Google mais aussi connecter les ordinateurs de la BU à des catalogues ou des bases de données distantes.


"[..] no bookstore, no yearbook, no student-run newspaper, no sports stadium, [..]"(2)



Du côté du journal étudiant déclaré manquant par Elaine Sciolino, Marc Petit reconnait qu'il n'y en a pas en tant que tel à Nanterre mais qu'il existe une multitude d'initiatives à l'échelle des départements. "Nous avons un journal de l'Université dont les colonnes sont ouvertes aux étudiants et une télévision associative sur le campus « Nanterre télévision ». Une quarantaine d'associations animent chacune à leur façon notre campus. Nous accueillons des troupes d'artistes professionnels en résidence au sein de deux compagnies : une de théâtre et une de danse. Nous disposons en outre d'un théâtre de 500 places et d'un amphi cinéma de 900 places qui vient d'être réhabilité. C'est, je crois, la plus grande salle du département". Et ceci sans compter chorale et orchestre de l'université composés de membres de la communauté universitaire.


En bref l'activité culturelle de Paris X Nanterre ne peut être réduite à l'absence d'un journal étudiant comme on peut les trouver sur les campus américains.



L'article a été publié sur le site du New York Times et du Herald Tribune. Sur ce dernier Elaine Sciolino précise que Nanterre n'a pas de sports stadium. "Nos installations sportives sont de très haut niveau" explique l'équipe de direction "nous avons une piscine olympique, des équipements athlétiques professionnels qui datent de moins de 2 ans, un terrain de football, de beach-volley et nous disposerons d'une nouvelle Halle aux sports à la fin de cette année 2006 ".


Au sujet des librairies Olivier Audéoud précise qu'elles existaient bien sur le campus mais ont fermé leurs portes il y a quelques années, n'étant pas viables économiquement : "Il y a deux raisons à cela, d'abord le fait que le campus n'est actif que 7 à 8 mois par an et la concurrence directe de la FNAC à la Défense qui est à 5 mn en métro de l'université". Plusieurs associations fournissent des livres sur commande ou organisent des bourses aux livres.


"At Nanterre, for example, there are only 1,050 dormitory rooms and a long waiting list.[..] Twenty-two students share three toilets, three showers and a small kitchen furnished with only a sink and a few electric burners."(3)


"Je ne vous dirai pas qu'elle est confortable" reconnaît Mar Petit au sujet de la Cité Universitaire, "les 1400 chambres sont en cours de réhabilitation". Gérée par le CROUS cette partie de l'immobilier universitaire quitte les normes des années 70 pour entrer dans celles du XXI eme siècle".


Quand à l'immobilier sous la responsabilité directe de l'université il est largement rénové ou en cours de rénovation et de construction. "Un nouveau bâtiment pour l'UFR STAPS sera livré à la rentrée prochaine et nous nous sommes engagés dans la construction d'un bâtiment dédié aux langues, leur pratique étant rendue obligatoire par le LMD"


Pas exactement l'image d'une université sclérosée donc.


L'université française avait pris un retard "considérable" dans sa politique immobilière reconnait la Présidence "mais nous le rattrapons progressivement"

<img src=www.amue.fr/images/actuimages/quotestart.gif>

"Sandwiched between a prison and an unemployment office just outside Paris [..]"


"Elle a préféré retenir des phrases de vieux Nanterrois qui stigmatisent une université coincée entre une prison et l'ANPE. Cette remarque est tellement vieille qu'elle ne correspond plus à la réalité. L'ANPE est fermée depuis plus de dix ans. De plus je ne vois pas le lien entre la notoriété d'une Université et son environnement".

Marc Petit, chef de cabinet, Paris X.


<img src=www.amue.fr/images/actuimages/quoteend.gif align="right" style="align:right";>



"[..] no corporate recruiting system"(4)


Peu de temps avant la parution de l'article du New York Times était organisée à Paris X, à l'initiative des étudiants, une manifestation professionnelle pour faire découvrir les métiers du droit. "Les plus grands cabinets internationaux étaient présents, ils venaient faire leur marché" expliquent les représentants de l'université.


Au niveau des masters des initiatives sont menées en partenariat avec les entreprises. "Nous disposons d'une mission d'insertion professionnelle- service emploi sur le campus" précise Marc Petit "c'est une structure qui centralise les offres de stage et d'emploi. Elle n'est peut être pas assez fréquentée, elle n'a peut être pas assez de moyens et je veux bien que l'on discute de ces aspects mais pas que l'on dise qu'il n'y a rien"


Effectivement il n'y a pas d'annuaire des anciens au niveau central de l'université avec des réseaux sociaux permettant de recruter les jeunes diplômés mais ces initiatives existent au sein des formations ou des nombreuses associations étudiantes.


La vie sur un campus français est elle comparable à celle d'un campus américain ?


Pour Elaine Sciolino cafeteria et Bibliothèque universitaire ferment trop tôt. Elle constate par ailleurs que le campus est désert en fin d'après-midi.


"La cafétéria est gérée par le CROUS, il est faux de dire qu'elle est fermée après le déjeuner. Le soir elle ne ferme jamais avant 19h. Par contre, en ce qui concerne la BU, nous sommes dans la moyenne des universités périphériques et le soir elle ferme à 19h parce que le public est peu nombreux. Elle est ouverte le samedi "


"Nous sommes sur un site où le soir Nanterre s'endort, mais parce que les étudiants sont en ville" constate Olivier Audéoud.


En terme d'organisation urbaine les campus français sont souvent situés en ville ou à proximité. La vie du campus se mélange plus naturellement avec celle de la ville. Les campus Anglo-Saxons sont conçus comme de mini-villes où l'on dort, mange et se divertit. Quel système est préférable ? Quelle organisation peut elle se prévaloir d'être un modèle idéal pour pouvoir juger celle des autres ?


"Tout ceci relève d'une différence culturelle entre les Etats-Unis et la France" relève la Présidence de Paris-X "Elaine Sciolino aurait tout aussi bien pu écrire que nous manquions de places de parking par rapport à un campus américain sans savoir que les étudiants français utilisent bien plus les transports en communs que leurs homologues d'outre-Atlantique qui sont habitués aux grandes distances et aux transports individuels"


Le "gap" culturel


"Ce qui est fascinant" déclare Olivier Audéoud au sujet de l'article "c'est cette projection du système universitaire américain sur celui français avec son journal, sa librairie et son terrain de base-ball. Il n'est pas question de copier le 'college' américain basé sur un principe d'a-culture alors que l'université française délivre une base culturelle plus vaste, intègre la recherche et une dimension internationale importante ".


"Combien d'université aux Etats-Unis ont de la recherche alors que toutes les universités Françaises en ont ?" lance le président de paris X.


Pour Marc Petit il est difficilement concevable de comparer des universités privées américaines avec les universités publiques françaises où les budgets proviennent essentiellement de l'Etat et qui sont déterminés par les choix de la Nation dans sa répartition des moyens au système universitaire.


Pour les deux responsables de Paris X l'article d'Elaine Sciolino fait preuve d'un grand "parti pris". "Elle ne se met même pas au niveau de l'université américaine moyenne, elle part d'une idée d'excellence qui ne concerne que peu d'universités aux Etats-Unis même "


Selon le Président de Paris X l'article est plus politique que journalistique à une heure où les systèmes universitaires internationaux se battent pour attirer les meilleurs étudiants. "Si c'est un travail de journaliste, c'est un mauvais travail. Elle s'appuie sur le pire"

Marc Petit remarque que la photo illustrant l'article a été prise dans l'endroit le plus dégradé de tout le campus : la résidence universitaire en travaux.


"[The university] reflects the crisis of France's archaic state-owned university system: overcrowded, underfunded, disorganized and resistant to the changes demanded by the outside world." (5)


L'université Française n'est donc pas réformable ou adaptable aux demandes du monde extérieur ?


"Il suffit de constater quel changement fut la mise en œuvre du LMD en matière de formation. Si j'en crois tous les efforts que nous avons développés pour faire évoluer le système et ceci afin de l'insérer dans le processus européen, ce simple exemple montre que les universités françaises sont aptes à se réformer et répondre aux demandes d'adaptation" déclare Marc Petit "C'est certainement la réforme la plus importante du système depuis les années 80"


Le droit de réponse.


Il va sans dire que l'article a fait parler de lui. Si Paris X est montrée du doigt il apparaît clairement que le système universitaire français est critiqué dans son ensemble.


"De multiples réactions indignées de l'équipe de direction et de l'ensemble de la communauté universitaire nanterroise appellent une réponse de notre part mais nous ne sommes pas dupes, un droit de réponse n'a pas le même impact qu'un article initial" analyse le chef de cabinet d'Olivier Audéoud


La direction de l'université s'étonne de l'absence d'informations demandées "dans l'urgence" par la journaliste, notamment concernant les budgets et qui n'apparaissent pas dans l'article. L'interview accordée par le président de l'université brille aussi par son absence. La voix institutionnelle manque certainement face aux affirmations de la correspondante française du New York Times.


Beaucoup déplorent l'impact négatif que l'article a pu avoir à l'étranger. La concurrence universitaire internationale est aussi une bataille de l'image avec ses codes et ses techniques. Faire valoir l'image de son université, la défendre, gérer son exposition médiatique sont sans doute de nouvelles cordes que les équipes présidentielles devront ajouter à leurs arcs.


_______________________________________________________________________



  1. "Seulement 30 ordinateurs sur 100 à la bibliothèque ont accès à Internet"

  2. "[..]il n'y a pas de librairie, d'annuaire, de journal étudiant, de stade [..]" (la version sur le site du Herald Tribune ajoute l'absence de stade.

  3. "A Nanterre, par exemple, il y a seulement 1050 chambres et une longue liste d'attente.[..] 22 étudiants partagent trois WC, trois douches et une petite cuisine uniquement équipée d'un évier et de quelques plaques électriques"

  4. Il n'y a pas de service de mise en relation avec l 'entreprise, de réseaux d'anciens"

  5. [L'université de Parix X] reflète l'archaïque système universitaire français, étatique, surpeuplé, sous-financé, désorganisé et résistant aux changements demandés par le monde extérieur"


 

Retour

Newsletter de l'agence

Les dernières actus de l'Amue dans votre boîte mail ! Inscrivez-vous à notre newsletter.

Besoin d’informations ?

Vous êtes décideur ou correspondant prescripteur au sein d’un établissement ESR et vous souhaitez plus de renseignements sur notre offre de services

Contactez-nous